Résumé Au Québec, environ 360 000 travailleurs sont exposés quotidiennement à des niveaux de bruit susceptibles d’engendrer des problèmes d’audition. Les protecteurs auditifs individuels sont souvent utilisés pour pallier ce problème. Cependant, l’inconfort lié à l'utilisation de ces protecteurs limite la durée du port et donc l'efficacité de la protection. Le développement d'outils de conception acoustique minimisant les sources d’inconforts auditifs et physiques de ces protecteurs tout en assurant une atténuation adéquate constitue le contexte de cette recherche. La présente étude se concentre sur deux indicateurs du confort associés au port des bouchons d’oreille : l’atténuation et l’effet d’occlusion. L’atténuation quantifie la réduction du niveau de pression acoustique au tympan. Cet indicateur peut être source d’inconfort s’il est trop important (impossibilité de communiquer) ou trop faible (niveaux de bruit trop élevé). L’effet d’occlusion est caractérisé par une augmentation du niveau de pression acoustique au tympan en basses fréquences résultant de la vibration des parois du conduit auditif créée par les sources internes au corps humain ou par conduction osseuse externe. Ces deux indicateurs de confort dépendent de nombreux facteurs (matériau des bouchons, positionnement dans l’oreille, etc.) encore aujourd’hui peu pris en compte dans les dispositifs expérimentaux dédiés à leur étude. En effet, les oreilles artificielles actuelles utilisent un cylindre métallique à section constante représentant le conduit auditif, recouvert d’une couche de silicone imitant la peau et terminé par un coupleur acoustique simulant l’impédance tympanique. Ce coupleur limite l’étude de l’atténuation puisque, de par sa conception, il restreint la profondeur d’insertion des bouchons. L’absence d’os temporal et de cartilage environnant le conduit ainsi que la simplification de sa géométrie dans ces oreilles artificielles limitent considérablement l’étude de l’effet d’occlusion. En résumé, ces oreilles artificielles sont peu adaptées à la mesure de l’atténuation de bouchons et ne permettent pas la mesure objective de l’effet d’occlusion. L’objectif de cette étude est de proposer des points méthodologiques pour la conception d’oreilles artificielles adaptées à ces mesures. La première originalité de cette étude est de reconstruire des modèles d’oreilles numériques 3D à partir d’images par résonnance magnétique (IRM) individuelles obtenues in vivo. La seconde originalité est le développement d’oreilles artificielles basées sur ces modèles géométriques et adaptées à l’étude du confort des bouchons grâce à la prise en compte de la géométrie et des tissus environnant le conduit auditif. Les propriétés mécaniques des oreilles artificielles sont ajustées lors de l’étape de fabrication pour simuler au mieux des tissus humains comme l’os, le cartilage ou les tissus mous. Une méthode d’estimation des champs de déplacement des parois du conduit auditif dus à l’insertion de bouchons d’oreilles est proposée et validée pour l’oreille artificielle et pour le cas d’un sujet. L’utilisation de cette méthode doit permettre la validation de matériaux synthétiques pour simuler le comportement mécanique de tissus humains. Enfin, des mesures d’atténuation et d’effet d’occlusion sont réalisées et comparées à des simulations numériques. À long terme, les outils développés dans cette étude permettront de contribuer à améliorer l’efficacité des protecteurs réduisant ainsi les risques de surdité des travailleurs.