Résumé Le travail de couvreur a été classé comme l'un des travaux les plus dangereux, avec un taux demortalité de 29 par 100 000 travailleurs (Toscano, 1997). Les couvreurs sont exposés à environsix fois plus de risques d'accidents graves et mortels que le travailleur moyen, les chutes étant lesévènements mortels dans 75 % des cas (Ruser, 1995). Les lésions causées par ces chutes sonthabituellement graves, exigeant de longues périodes de traitement et de convalescenceoccasionnant des frais médicaux importants. Les réglementations internationales sont claires;l'Occupational Safety and Health Administration (OSHA) stipule qu'il faut protéger lestravailleurs exposés à un risque de chute de 1,8 mètre (OSHA, 1998) alors que le Code desécurité pour les travaux de construction (S-2.1, r.6) et le Règlement sur la santé et la sécurité dutravail (S-2.1, r.19.01) stipulent qu'il faut protéger les travailleurs exposés à un risque de chutede 3 mètres (S-2.1, r.6, 2001; S-2.1, r.19.01, 2001). Sur un plancher, le garde-corps est le moyende protection collective contre les chutes le plus approprié (Lan, 2005). Il permet la mobilité et ildispense le travailleur du port d'un harnais et évite la pose d'ancrage pour les longes destravailleurs. La pose d'ancrages de 18 kN de résistance est toujours problématique, surtout pourles structures à charpente métallique légère, les édifices temporaires et/ou vétustes.Présentement, les couvreurs utilisent des garde-corps préfabriqués faits de membruresmétalliques, installés à pied d'oeuvre en périmètre des toits plats. D'après l'Association desMaîtres couvreurs du Québec (AMCQ), ces garde-corps sont pratiques et conviennent bien auxtravaux effectués sur les toits plats, mais ils n'ont jamais fait l'objet d'une vérification oud'essais pour vérifier s'ils sont sécuritaires et conformes au Code de sécurité pour les travaux deconstruction (S-2.1, r.6). À la demande de l'AMCQ, la présente étude vise à vérifier, par calculset par essais, si les trois modèles de garde-corps métalliques les plus utilisés par les couvreurssont sécuritaires et rencontrent les exigences des articles 3.8.2 et 3.8.3 du S-2.1, r.6 pour assureraux couvreurs une protection adéquate contre les chutes de hauteur.Les principaux objectifs de l'étude visent donc à :vérifier si les trois modèles de garde-corps préfabriqués métalliques les plus utilisés par lescouvreurs, installés à pied d'oeuvre en périmètre de toits plats, sont sécuritaires et rencontrentles exigences des articles 3.8.2 et 3.8.3 du Code de sécurité pour les travaux de constructiondu Québec pour assurer aux couvreurs une protection adéquate contre les chutes;valider les paramètres d'ancrage sur les toits plats et/ou définir ces paramètres;vérifier la capacité de ces trois garde-corps à retenir un torse de bois de 100 kg animé d'unevitesse de 2 m/s;étudier les principales caractéristiques du heurt le plus réaliste entre le travailleur et le gardecorps.Les démarches suivies comprenaient : 1) revue de littérature sur les garde-corps relative auxaspects normatif et réglementaire (Québec, Canada et États-Unis), consultation des guidesexistants de conception ou d'utilisation, notamment celui de la Construction Safety Associationof Ontario (CSAO) et protocole d'essais pour valider le garde-corps; 2) sondage de l'AMCQauprès de ses membres pour déterminer les trois types de garde-corps les plus utilisés par lescouvreurs sur les toits plats; 3) rencontre avec le(s) fabricant(s) de ces trois garde-corps pourcolliger les caractéristiques géométriques et mécaniques des garde-corps, entre autres : lesdimensions du montant, de la lisse supérieure, la portée caractéristique d'une section type degarde-corps, le(s) ancrage(s) des garde-corps et la méthode d'assemblage de chaque garde-corpssur les chantiers; 4) observations sur les chantiers de ces trois garde-corps pour relever lesconditions d'installations détaillées aux chantiers lors des travaux de réfection des toits afinreconstituer les mêmes conditions d'installation en laboratoire; 5) reconstitution au laboratoired'une toiture type d'une charpente métallique légère industrielle, faite de deux sections de 20' x16' au Laboratoire Hydro-Québec de l'École Polytechnique suivant les règles de pratiquesétablies en charpente métallique avec un parapet du type sandwich, qui, d'après le milieu, estl'un des parapets les plus construits et qui serait le moins résistant; 6) des essais de résistance surles trois garde-corps pour vérifier expérimentalement la résistance de composantes constituant legarde-corps (profilé tubulaire du montant, soudure, plaque d'appui, lisse supérieure); 7) essaissur les garde-corps installés tels qu'aux chantiers sur la toiture reconstituée pour vérifier leurconformité au Code de sécurité pour les travaux de construction du Québec d'après le protocoled'essais de l'IRSST; 8) essais dynamiques pour vérifier la capacité des garde-corps pour arrêterla chute d'un torse de bois à une vitesse de 2 m/s; 9) analyse des résultats en vue de formuler desrecommandations.Les principaux résultats de cette étude ont montré que :Installés sur la bille de bois et sur le parapet sandwich neuf, les trois garde-corpsrencontrent les exigences des articles 3.8.2 et 3.8.3 du Code de sécurité pour les travauxde construction du Québec, S-2.1, r.6; par conséquent, ils sont conformes au Code desécurité pour les travaux de construction du Québec.Les différents montages des garde-corps sur la bille de bois et sur le parapet dans lesdirections parallèle et perpendiculaire aux poutrelles ont permis de valider et de définirles paramètres d'ancrage des garde-corps sur toits plats.Dans les essais statiques sur montant unique ancré à la bille de bois, nous avons observéla plastification de l'acier à la base du montant sous une charge horizontale inférieure à lacharge prescrite de 900 N pour le garde-corps fabriqué par Alcor et Innovation MalenfantInc. Dans tous les autres essais statiques, les montants de tous les garde-corps sontdemeurés élastiques. Même si le cas de charge sur le montant unique est le cas de chargele plus critique, il faut en tenir compte car c'est un mode de rupture qui peut survenir auchantier.Dans les essais dynamiques, où les garde-corps étaient ancrés au parapet, tous les gardecorpsont résisté à l'impact du mannequin de 100 kg. Le mannequin est demeuré àl'intérieur de la toiture et les montants et lisses supérieures des garde-corps n'ont subiqu'un endommagement limité lors des essais dynamiques. La déformation horizontale àl'impact variait entre 172 mm et 286 mm selon le manufacturier et la configurationd'essais. La déformation résiduelle après l'impact variait entre 1 mm et 76 mm selon lemanufacturier et la configuration d'essais. Les trois garde-corps sont donc capables deretenir un torse de bois de 100 kg animé d'une vitesse de 2 m/s sans abandon de lacharge.Ces résultats ont permis de faire les recommandations suivantes :Le nombre limité des essais dynamiques n'a pas permis de colliger suffisamment lesdonnées expérimentales pour 1) définir le heurt réaliste le plus sévère d'une personne surun garde-corps en prenant en compte la déformabilité du corps humain; 2) traduire ceheurt en termes mécaniques (recours à la biomécanique); et 3) traduire ce heurt en termesde sollicitations du garde-corps (les caractéristiques mécaniques du garde-corps et ducorps humain doivent intervenir). Par conséquent, nous recommandons une étudesubséquente pour mieux définir la dynamique de l'arrêt de chute par un garde-corpsparce que les essais dynamiques avec le torse de bois de 100 kg sont des essais trèssévères et ne reflètent pas la réalité de l'impact du travailleur sur la lisse supérieure.Dans les essais statiques sur montant unique ancré à la bille de bois, nous avons observéla plastification de l'acier à la base du montant sous une charge horizontale inférieure à lacharge prescrite de 900 N pour les garde-corps fabriqués par Alcor et InnovationMalenfant Inc. Dans tous les autres essais statiques, les montants de tous les garde-corpssont demeurés élastiques. Même si le cas de charge sur le montant unique est le cas decharge le plus critique, il faut en tenir compte car c'est un mode de rupture qui peutsurvenir au chantier. Par conséquent, nous recommandons que les fabricants Alcor etInnovation Malenfant Inc. choisissent comme montant un profilé légèrement plusrésistant pour les nouveaux garde-corps. Outre la résistance accrue, les garde-corpsauront une plus longue durée d'utilisation.L'ensemble des résultats est valide pour les conditions d'essais décrits dans le document.Installés sur la bille de bois et sur le parapet neuf, les garde-corps rencontrent lesexigences de S-2.1, r.6. Puisque la résistance de l'ensemble parapet/garde-corps dépendprincipalement de la résistance du parapet, nous recommandons fortement de vérifierl'état du parapet avant d'installer les garde-corps. Pour ce faire, nous pouvons utiliser unerègle du pouce qui consiste à secouer le garde-corps pour évaluer sa résistance.