Résumé Une revue des publications sur le cancer chez les pompiers parues depuis l'analyse documentaire réalisée en 2007 par le CIRC a été entreprise dans le but de mettre en évidence de nouvelles preuves de liens ou des indicateurs d'associations possibles entre la profession de pompier et le cancer. Cette revue de la littérature a porté sur 21 sièges de cancer à l'égard desquels certaines preuves de lien non concluantes étaient ressorties des revues antérieures. Plus de 600 publications sur l’exposition et l’épidémiologie ont ainsi été dépouillées en quête de données reliées au cancer chez les pompiers. Parmi elles, 11 études clés ont été retenues comme sources de données épidémiologiques primaires, auxquelles se sont ajoutées 14 études cas-témoins justificatives. Chacune des publications examinées mais non retenues est présentée en annexe et assortie d'un bref motif d'exclusion dans le cadre de l'analyse détaillée de cette revue de la littérature. Les études sur les pompiers décrites dans ce rapport portent sur de longues périodes d’emploi (jusqu'à 40 ans) et incluent certaines cohortes d'envergure, de sorte qu'elles complètent de façon utile les données précédemment disponibles. Les études retenues ont été résumées et notées quant à leur qualité, après quoi des conclusions ont été formulées à l'égard de chacun des 21 sièges de cancer en fonction des résultats issus des études et de la plausibilité d'un lien avec la profession, compte tenu de l'exposition connue des pompiers à divers produits chimiques. Les éléments de preuve réunis pour chacun des sièges de cancer ont été classés selon deux dimensions, la première axée sur la présence d'une association statistiquement significative entre le cancer et la profession de pompier (Nulle, Limitée, Mixte, Convergente), et la seconde, axée sur la qualité de l'étude, l'existence d'un mécanisme plausible et la démonstration d'une tendance (Très faible, Faible, Modérée, Forte). Le tableau qui suit résume les résultats du classement des cancers à l'égard desquels une association statistique a été constatée. Les résultats obtenus y sont comparés aux conclusions de la revue antérieure du CIRC. Étant donné que la présente analyse documentaire couvrait une période de publication restreinte comportant un nombre limité d'études – parfois petites et sur un type de cancer précis –, il était peu probable qu'il s'en dégage de fortes indications statistiques et, par conséquent, qu’elle puisse associer de façon concluante certains cancers et la profession. Les éléments de preuve sont en partie limités par le nombre et la qualité des études disponibles, mais aussi par l'absence de données détaillées sur l'exposition de chaque pompier à des substances précises. L'objectif plus modeste consistant à déceler l'existence de nouveaux indicateurs ou de preuves suggestives s'est toutefois avéré réalisable. Les conclusions de ce rapport reposent uniquement sur les données probantes publiées depuis 2007, hormis celles de quelques publications légèrement antérieures non prises en compte dans l'analyse documentaire du CIRC. Plus précisément, aucun effort n'a été déployé pour revoir et intégrer toutes les données probantes publiées à ce jour. Une évaluation complète des preuves d'association et de risque relatives à un type de cancer particulier exigerait un examen exhaustif de toutes les données disponibles sur ce type de cancer, assorti d'une méta-analyse des données de l'ensemble des études afin de rehausser la puissance statistique de la démarche. Les preuves d'association relatives à chaque type de cancer abordé dans ce rapport ne s’appuient que sur la période de publication restreinte couverte par la présente revue de la littérature, de sorte que les conclusions s'en trouvent limitées d'autant. La plus forte preuve d'association qui ressort de cette analyse documentaire concerne un excès de mésothéliomes chez les pompiers actifs il y a plus de 30 ans, probablement dû à l'exposition à l'amiante. Le cancer du poumon ne présente pas une association aussi marquée, mais comme on le sait relié aux mêmes expositions, son lien avec la profession ne peut être entièrement écarté. Il n'existe aucune preuve concluante d'association entre la profession de pompier et quelque autre type de cancer, mais la présente revue de la littérature et la revue antérieure du CIRC (2010a) font toutes deux état de cas plus fréquents de LNH et de cancer de la prostate chez les pompiers. Résumé des conclusions sur le cancer chez les pompiers Siège/type de cancer Degré d'association statistique Qualité de la preuve d'association Conclusion antérieure du CIRC (2010a) Cerveau Mixte Faible Non confirmé* Côlon/rectum (gros intestin) Mixte Très faible Non confirmé* Intestin grêle Limitée Très faible Leucémie – tous les types Limitée Faible Lymphome non hodgkinien(LNH) Mixte Modérée Possible (environ 20 % d’excès) Mésothéliome Convergente Forte Myélome multiple Limitée Très faible Non confirmé* Œsophage Mixte Faible Peau – mélanome Mixte Faible à modérée Non confirmé* Peau – non mélanome Limitée Très faible Poumon Mixte Faible à modérée Prostate Mixte Modérée Possible (environ 30 % d’excès) Rein Mixte Faible à modérée Tête et cou (incluant le larynx et le pharynx) Limitée Faible Vessie Limitée Faible * Siège/type indiqué par une méta-analyse (LeMasters et coll., 2006), mais non confirmé par le CIRC. Nota : aucunes données n'étant disponibles en ce qui concerne plus précisément la période de latence des cancers chez les pompiers, une période de latence présumée de plus de 10 ans pour la plupart des cancers, de plus de 20 ans pour le cancer du poumon, et de plus de 30 ans pour le mésothéliome correspond aux valeurs convenues à l'échelle internationale, bien qu'un mésothéliome se soit occasionnellement déclaré après une plus courte période. Sauf en ce qui concerne le mésothéliome, les données issues de la présente analyse documentaire se sont avérées insuffisantes pour confirmer ou infirmer de façon concluante quelque association que ce soit entre le cancer et la profession. Il existe néanmoins certaines preuves d'association entre la profession de pompier et les cancers de la vessie, du cerveau, du côlon/rectum, de la tête et du cou, des reins, de l'œsophage, de la peau et de l'intestin grêle, de même qu'avec la leucémie et le myélome multiple. Une méta-analyse effectuée en 2007 indiquait que certains de ces cancers (cerveau, côlon/rectum et peau) pouvaient être reliés à la profession de pompier, mais pas l'analyse documentaire du CIRC. Les liens entre la profession et d'autres types de cancer relevés dans la présente revue de la littérature ne sont pas étayés par les revues antérieures, de sorte qu'on ne peut en tirer aucune autre conclusion.