Résumé Les emplois générés par les efforts d’écologisation de l’économie sont en pleine croissance. Ces emplois, couramment appelés « emplois verts », étaient estimés en 2010 à plus de 155 000 au Québec et à 682 000 au Canada. Ces chiffres dépendent bien entendu des définitions données aux termes « écologie » et « environnement », mais donnent une idée de l’importance de ce secteur en croissance. Plusieurs nouvelles technologies se développent et il est impératif d’en apprécier les risques potentiels pour la santé des travailleurs. L’objectif de cette recherche est de tracer le portrait québécois des emplois verts et d’apprécier le risque potentiel pour la santé des travailleurs découlant de leur exposition aux substances chimiques et aux agents biologiques. Il s’agit plus spécifiquement : de définir le secteur économique « vert » au Québec; d’identifier les « emplois verts »; de déterminer les substances chimiques et les agents biologiques auxquels les travailleurs pourraient être exposés; et d’en apprécier qualitativement le risque potentiel pour la santé des travailleurs. Plusieurs outils ont dû être adaptés ou créés afin d’atteindre ces objectifs. L’identification des emplois verts s’est basée principalement sur les critères extraits de la Loi sur le développement durable du Québec. Le Système de classification des industries de l’Amérique du Nord (SCIAN) et la Classification nationale des professions (CNP) ont établi la base à partir de laquelle nous avons identifié les appellations d’emploi vert au Québec. L’appréciation du risque pour les travailleurs s’appuie principalement sur le modèle de gestion graduée du risque (Control Banding). Cette méthode de gestion qualitative de risque vise à assurer la sécurité des travailleurs exposés à des produits pour lesquels peu d’informations sont disponibles. Un niveau ou bande de danger (toxicité) est attribué aux substances en les comparant à des produits similaires dont le danger est connu et l’exposition à ces substances au poste de travail est également estimée de façon semi-quantitative (bande d’exposition). La majorité des modèles sont fondés sur quatre ou cinq grandes bandes de danger et un nombre équivalent de bandes d’exposition, représentant ainsi de 16 à 25 situations possibles. L’ensemble de la démarche a permis d’identifier environ 400 appellations d’emplois qui peuvent être considérés « verts » selon la définition proposée et les critères retenus. Ces emplois sont regroupés dans 63 professions différentes pour lesquelles le risque chimique ou biologique potentiel a été apprécié et dont 21 représentent un risque élevé. Elles sont donc prioritaires en termes de recherche sur la santé et la sécurité des travailleurs. D’une façon plus spécifique, les résultats mettent en évidence le risque associé à la gestion des matières résiduelles, une industrie grandissante à laquelle de plus en plus d’activités peuvent être reliées, comme la production énergétique, la production agricole ou la récupération de matières premières. Les centres de tri se multiplient, l’épuration des effluents industriels prend de l’importance tandis que les certificats d’autorisation des sites d’enfouissement ne se délivrent plus aussi facilement qu’autrefois. Bien que l’appellation « emplois verts » soit à la mode et s’inscrive dans une perspective de développement durable, peu d’informations sont disponibles sur le sujet. Il s’agit de la première étude de cette nature au Québec. Elle peut donc servir de base pour la détermination de priorités de recherche futures dans le domaine des emplois verts. De plus, les hygiénistes peuvent avantageusement utiliser la méthode développée dans une perspective de prévention ou de protection des travailleurs, avec une approche qu’ils pourront enrichir de données plus précises ou quantitatives.