Résumé Cette étude s’inscrit dans un processus d’exploitation des données statistiques de la CSST, conjointement avec les données du recensement canadien, processus qui a débuté il y a plus de 25 ans à l’IRSST. Le jumelage de ces deux sources de données permet d’obtenir des portraits statistiques de la situation d’ensemble des travailleurs québécois indemnisés pour des lésions professionnelles, qui ne seraient pas disponibles autrement. Cette étude permet notamment d’identifier des groupes de travailleurs et des industries-catégories professionnelles dont les problèmes de SST sont importants, ce qui constitue une information précieuse pour la planification de la recherche et de la prévention. Ce rapport présente, pour la période 2005-2007, des indicateurs de risque (taux de fréquence ETC), de gravité (durée moyenne d’indemnisation, APIPP) et de risque-gravité (taux de fréquence-gravité ETC) des lésions professionnelles avec perte de temps indemnisée (PTI) par industrie-catégorie professionnelle, sexe et groupe d’âge ainsi que des informations sur les caractéristiques des lésions avec PTI. Les indicateurs ont été calculés sur la base du nombre de travailleurs rémunérés en équivalent temps complet (ETC) plutôt que sur la base des effectifs en nombre d’individus. L’utilisation des effectifs ETC vise à tenir compte de l’importance du travail atypique, en particulier du travail à temps partiel ou occasionnel, et des différences qui existent selon l’âge et le sexe. Des indicateurs distincts pour les jeunes (15-24 ans), les travailleurs de 45 ans et plus, les maladies professionnelles et les industries cibles, sont également présentés. Par ailleurs, des tableaux de classement des industries-catégories professionnelles pour l’ensemble des travailleurs, selon le sexe et selon le groupe d’âge, sont présentés dans le deuxième document de cette étude : « II – Tableaux de classement par industrie-catégorie professionnelle ». Au cours de la période 2000-2002 à 2005-2007, le nombre annuel moyen de lésions professionnelles indemnisées par la CSST a poursuivi la diminution amorcée depuis la fin des années 1980. Cette diminution s’est d’ailleurs poursuivie jusqu’en 2010, dernière année pour laquelle nous disposons de statistiques compilées. Cette tendance n’est toutefois pas spécifique au Québec puisqu’on la retrouve aussi dans l’ensemble du Canada. Les travailleurs manuels de la construction, de la forêt et des mines continuent d’être parmi les groupes de travailleurs ayant les taux de fréquence-gravité ETC les plus élevés en 2005-2007. Toutefois, avec des taux du même ordre de grandeur, des activités économiques du tertiaire ressortent aussi. Par exemple, les travailleurs manuels des services de gestion des déchets et de l’assainissement, ceux de l’administration publique locale, municipale ou régionale et ceux des marchands de matériaux de construction et de fournitures de jardinage. Ainsi, en plus des industries traditionnellement considérées comme ayant des problèmes de SST élevés, il faut également prendre en considération d’autres industries, moins fréquemment ciblées, qui ressortent uniquement lorsque l’indicateur est produit en tenant compte de l’industrie et de la catégorie professionnelle. Le classement des professions selon la catégorie professionnelle est essentillement basé sur l’effort physique exercé par le travailleur. Il y a trois catégories professionnelles, les professions manuelles, les non-manuelles et, une catégorie intermédiaire les professions mixtes. En 2005-2007 on compte annuellement, en moyenne, plus de 120 000 lésions acceptées par la CSST, dont près de 93 000 lésions avec perte de temps indemnisée. Tant chez les hommes que chez les femmes, les travailleurs qui occupent des professions manuelles présentent un risque plus élevé de subir une lésion professionnelle que ceux qui occupent des professions non manuelles ou mixtes. Par ailleurs, près de 70 % des lésions professionnelles avec PTI surviennent à des hommes. Cette situation est en bonne partie attribuable au fait que les hommes se retrouvent en plus grande proportion dans des professions à risque et qu’ils sont davantage présents sur le marché du travail, surtout lorsqu’on tient compte du nombre d’heures travaillées. Malgré la distribution inégale des lésions professionnelles avec PTI entre les hommes et les femmes, celles-ci ont un taux de fréquence-gravité ETC plus élevé que les hommes pour une même catégorie professionnelle. Cette situation s’explique essentiellement par une durée moyenne d’indemnisation plus longue chez les femmes. Par ailleurs, la gravité des lésions en termes d’APIPP est plus élevée chez les hommes. Toutefois, il n’y a pas nécessairement contradiction entre ces constats puisque l’APIPP et les durées moyennes mesurent des aspects différents de la gravité des lésions. Ainsi, cette étude démontre que les différences selon le genre, en termes de fréquence et de gravité des lésions professionnelles avec PTI, tiennent en partie au fait que les hommes et les femmes ne se répartissent pas également entre les professions et que les types de lésions qui surviennent aux hommes ainsi que leurs caractéristiques sont différents de ceux des femmes. Les analyses différenciées selon le groupe d’âge permettent de constater que, pour la période 2005-2007, la situation des jeunes se distingue par un taux de fréquence ETC passablement plus élevé que la moyenne. Ceci s’explique, en grande partie, par le fait que les travailleurs manuels et mixtes occupent une place beaucoup plus importante chez les 15-24 ans comparativement à l’ensemble de la main-d’œuvre rémunérée. Par contre, les écarts entre les taux de fréquence s’amenuisent lorsqu’on tient compte de la catégorie professionnelle. Par ailleurs, ce qui distingue le plus les travailleurs âgés de 45 ans et plus des jeunes ce sont les indices de gravité des lésions professionnelles. En effet, leur durée moyenne d’indemnisation est plus élevée, leurs lésions sont plus souvent accompagnées d’une APIPP et leur taux moyen d’APIPP est également légèrement supérieur à la moyenne. L’étude met également en lumière certaines différences en ce qui a trait aux descripteurs de lésions professionnelles (siège, nature, genre d’accident, agent causal). Les maladies professionnelles représentent environ 4 % des lésions professionnelles acceptées au cours des années 2005 à 2007, soit, en moyenne, un peu plus de 5 000 nouveaux cas par année. Bien qu’elles soient moins nombreuses que les accidents du travail, l’effet permanent des maladies professionnelles sur la santé des travailleurs justifie l’importance de s’attarder à ce type de lésions. Ainsi, pour les cas de maladie professionnelle, la proportion de travailleurs ayant une APIPP est très élevée et la durée moyenne d’indemnisation de ceux ayant entraîné une absence du travail est importante. Globalement, le risque de maladie professionnelle est plus élevé chez les travailleurs masculins manuels et mixtes. Toutefois, cet écart entre les hommes et les femmes est en partie attribuable à la situation des travailleurs âgés de 45 ans et plus. Ensemble, les troubles de l’oreille (qui touchent davantage les hommes) et les troubles musculo-squelettiques (qui touchent davantage les femmes) comptent pour plus de 8 maladies professionnelles acceptées sur 10. Dans un processus de détermination de priorités de recherche ou d’intervention, il est important de cibler les groupes de travailleurs ayant les plus importants problèmes de santé et de sécurité du travail. Plusieurs indicateurs peuvent être utilisés puisque chacun présente une facette différente, mais tout aussi importante, des lésions professionnelles. Le chapitre huit présente les industries-catégories professionnelles qui se situent en tête de liste pour les principaux indicateurs produits. Il appert que les 17 industries-catégories professionnelles dont le taux de fréquence-gravité ETC des lésions avec PTI est au moins trois fois supérieur à la moyenne québécoise représentent 7 % de la main-d'œuvre, mais 23 % des lésions avec PTI. Dans la majorité des cas, il s’agit de travailleurs manuels, exception faite de 2 industries qui ciblent des travailleurs mixtes.