IRSST - Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail

Méthodologie innovante pour la caractérisation des matériaux acoustiques en laboratoire et étude de son applicabilité sur le terrain

Résumé

Au Québec, la surdité professionnelle constitue la seconde maladie en importance, selon le nombre de cas, à être indemnisée par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST). Le bruit accroît également le risque d’accidents en masquant les signaux avertisseurs, en réduisant l’intelligibilité des échanges et en augmentant la fatigue des travailleurs. Diminuer le bruit permet de réduire les cas de surdité professionnelle et les coûts qui y sont associés, mais aussi de limiter la contribution de ce facteur aux accidents du travail, tout en améliorant la qualité de vie des travailleurs. La réduction du bruit en milieu de travail peut être effectuée selon trois axes : la réduction à la source (machine moins bruyante ou encoffrement), la diminution de sa transmission (installation d’écrans ou de matériaux absorbants) ou l’atténuation (port de protecteurs auditifs ou limitation du temps d’exposition). C’est le second axe (matériaux absorbants) qui est au cœur de cette étude.

La performance d’un traitement insonorisant se traduit par un coefficient d’absorption, qui est défini théoriquement entre une valeur de 0 (matériau non absorbant) et une valeur de 1 (matériau parfaitement absorbant). Peu précise à plusieurs égards, la mesure de ce coefficient est uniquement réalisée en laboratoire. Elle est caractérisée par la grande variabilité des résultats entre les laboratoires de test et les valeurs d’absorption obtenues atteignent souvent des valeurs non physiques en pratique (supérieures à 1). Pourtant, ces valeurs servent actuellement à choisir des matériaux pour des traitements absorbants, ou pour réaliser des calculs prévisionnels de bruit (pour lesquels la principale source d’erreur reste la connaissance précise de ces coefficients).

Sur la base d’une première preuve de concept, la présente étude propose une méthode de caractérisation robuste et fiable des traitements absorbants en laboratoire et évalue son applicabilité sur le terrain, afin de pouvoir mesurer les performances réelles des matériaux après leur installation. L’approche proposée repose sur la mesure de la propagation acoustique entre une source mobile (formant une « antenne » virtuelle) et un doublet microphonique fixe à faible distance d’un échantillon du matériau testé. Dans une étape de post-traitement ultérieure, ces données sont utilisées pour obtenir le coefficient d’absorption dans des conditions de champ acoustique diffus.

Un choix de cinq matériaux typiques a tout d’abord été effectué en concertation avec le comité de suivi de cette étude. Ces matériaux ont ensuite été testés selon les méthodes normatives actuelles, soit celles de la chambre réverbérante et du tube d’impédance. Les paramètres physiques intrinsèques pertinents de chaque matériau ont également été mesurés afin de pouvoir modéliser leur absorption acoustique (paramètres dits de Johnson-Champoux-Allard, soit la résistivité au passage de l’air, la tortuosité, la porosité, la longueur caractéristique thermique et la longueur caractéristique visqueuse). Le résultat de cette modélisation a ensuite été utilisé comme solution de référence pour la valeur du coefficient d’absorption. La valeur obtenue par l’approche proposée a été comparée à cette solution de référence. Par ailleurs, des simulations par éléments finis ont permis de proposer une configuration optimale pour la dimension du matériau testé, la géométrie de l’antenne de sources et celle du doublet microphonique.

Les résultats obtenus en laboratoire (dans une chambre anéchoïque) et hors laboratoire (dans deux locaux ordinaires, en présence de réverbération et de bruit de fond) confirment le potentiel de l’approche à mesurer une absorption réaliste des divers matériaux testés, généralement en conformité avec les valeurs obtenues par simulation numérique. L’approche résulte par contre en une valeur d’absorption parfois erronée dans le domaine des basses fréquences, en raison du modèle de propagation utilisé à l’étape de post-traitement des mesures. Une piste d’amélioration de ce modèle est proposée et partiellement étudiée.

Informations complémentaires

Catégorie : Rapport de recherche
Auteur(s) :
  • Olivier Robin
  • Celse Kafui Amédin
  • Noureddine Atalla
  • Olivier Doutres
  • Franck Sgard
Projet de recherche : 2014-0006
Mis en ligne le : 14 septembre 2018
Format : Texte