IRSST - Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail

Lésions professionnelles indemnisées au Québec en 2010-2012 : Profil statistique par industrie - catégorie professionnelle

Résumé

Cette étude s’inscrit dans un processus d’exploitation des données statistiques de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST), conjointement avec les données du recensement (remplacé en 2011 par l’Enquête nationale auprès des ménages [ENM]), processus qui a débuté il y a plus de 30 ans à l’Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail (IRSST). Elle permet notamment d’identifier des groupes de travailleurs et des industries-catégories professionnelles dont les problèmes de SST sont les plus importants, ce qui constitue une information précieuse pour la planification de la recherche et de la prévention.

Ce rapport présente, pour la période 2010-2012, des indicateurs de risque (taux de fréquence calculer avec des effectifs de travailleurs en équivalent temps complet [ETC]), de gravité (durée moyenne d’indemnisation, atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique [APIPP]), de risque-gravité (taux de fréquence-gravité ETC) et de coût des lésions professionnelles acceptées et de celles avec perte de temps indemnisée (PTI). Les caractéristiques descriptives des lésions sont aussi présentées.

Les indicateurs ont été calculés sur la base des heures travaillées converties en nombre d’employés en ETC ( 1 ETC correspond à 2 000 heures travaillées) plutôt que sur la base des effectifs en nombre d’individus. L’utilisation des effectifs en ETC vise à tenir compte de l’importance du travail atypique, en particulier du travail à temps partiel ou occasionnel, et des différences qui existent selon l’âge et le sexe. Des indicateurs distincts pour les jeunes (15-24 ans), les travailleurs de 55 ans ou plus, les maladies professionnelles et les industries cibles sont également présentés. Par ailleurs, des tableaux de classement des industries-catégories professionnelles pour l’ensemble des travailleurs, selon le sexe et le groupe d’âge, sont présentés dans le deuxième document de cette étude : « II – Tableaux de classement par industrie-catégorie professionnelle ».

Au cours de la période 2005-2007 à 2010-2012, le nombre annuel moyen de lésions professionnelles indemnisées par la CNESST a poursuivi la diminution amorcée depuis la fin des années 1980. D’ailleurs, cette baisse est observée jusqu’en 2013, dernière année pour laquelle des statistiques compilées étaient disponibles au moment de l’étude. Cette tendance n’est toutefois pas spécifique au Québec puisqu’on la retrouve aussi dans l’ensemble du Canada.

Les travailleurs manuels des activités de soutien à l’agriculture et à la foresterie, des entrepreneurs spécialisés de la construction, et ceux des mines et carrières continuent d’être parmi les regroupements de travailleurs ayant les taux de fréquence-gravité ETC les plus élevés. Toutefois, avec des taux du même ordre de grandeur, des secteurs d’activité économique des services ressortent aussi. Par exemple, les travailleurs manuels des grossistes-distribueurs de produits pétroliers, ceux de la gestion des déchets et de l’assainissement, des services d’hébergement, des magasins d’appareils électroniques et ménagers et ceux des établissements de soins infirmiers, pour n’en nommer que quelques-uns. Ainsi, certaines industries moins fréquemment ciblées se démarquent uniquement lorsque l’indicateur est produit en tenant compte de l’industrie et de la catégorie professionnelle. Le classement des professions selon la catégorie professionnelle est essentiellement basé sur l’effort physique déployé par le travailleur. Il y a trois catégories professionnelles : les professions manuelles, les non-manuelles et, une catégorie intermédiaire, les professions mixtes.

En 2010-2012, on compte annuellement, en moyenne, plus de 92 400 lésions acceptées par la CNESST, dont près de 69 000 lésions avec perte de temps indemnisée. Tant chez les hommes que chez les femmes, les travailleurs qui occupent des professions manuelles ont un taux de fréquence des lésions (6,4 par 100 travailleurs ETC) beaucoup plus élevé que les travailleurs qui occupent des professions non manuelles (0,6 %) ou mixtes (2,6 %). Par ailleurs, plus de 66 % des lésions professionnelles avec PTI surviennent à des hommes. Cette situation est en bonne partie attribuable au fait que les hommes se retrouvent en plus grande proportion que les femmes dans des professions à risque.

Malgré que, toutes professions confondues, ce soit les hommes qui ont un taux de fréquence-gravité des lésions professionnelles plus élevé, les femmes ont un taux plus élevé que les hommes pour chaque catégorie professionnelle. Il en ressort que le taux global plus élevé des hommes tiennent en grande partie au fait que les hommes et les femmes ne se répartissent pas également entre les professions, plutôt qu’à un risque plus élevé de lésion professionnelle chez les hommes. Par ailleurs, la distribution des lésions selon leurs caractéristiques (siège et nature, genre d’accident et agent causal) présente des différences entre les femmes et les hommes.

Les analyses différenciées selon le groupe d’âge indiquent que, pour la période 2010-2012, la situation des jeunes se distingue par un taux de fréquence en ETC passablement plus élevé que la moyenne, toutes professions confondues. Toutefois, les écarts sont pratiquement inexistants et peuvent même s’inverser lorsqu’on tient compte de la catégorie professionnelle. Cela s’explique, en grande partie, par le fait que les travailleurs manuels et mixtes occupent une place beaucoup plus importante chez les 15-24 ans. Par ailleurs, ce qui distingue le plus les travailleurs âgés de 55 ans ou plus des jeunes, ce sont leurs indicateurs de gravité qui sont plus élevés. L’étude met également en lumière certaines différences en ce qui a trait aux descripteurs de lésions professionnelles selon l’âge (siège, nature, genre d’accident, agent causal).

Les maladies professionnelles représentent environ 6 % des lésions professionnelles acceptées au cours des années 2010-2012, soit, en moyenne, près de 5 800 nouveaux cas par année. Moins nombreuses que les accidents du travail, elles ont toutefois des conséquences plus graves, en moyenne. Ainsi, près de 69 % des employés ayant eu une maladie professionnelle ont une atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique (APIPP) et la durée moyenne d’indemnisation des cas ayant entraîné une absence du travail est importante. Globalement, le taux de fréquence des maladies professionnelles est plus élevé chez les travailleurs masculins manuels, parfois mixtes, des industries primaires et de la fabrication. L’écart entre les hommes et les femmes est en grande partie attribuable à la situation des travailleurs âgés de 55 ans ou plus. Les troubles de l’oreille (qui touchent davantage les hommes) et les troubles musculosquelettiques (qui touchent davantage les femmes) comptent respectivement pour près de 79 % et plus de 12% des maladies professionnelles acceptées, soit plus de 9 maladies professionnelles sur 10 au total. Depuis 2005-2007, le nombre de maladies professionnelles a augmenté tandis que le nombre d’accidents du travail a diminué.

Le coût des lésions professionnelles, tel qu’estimé dans la présente étude, constitue une mesure globale de l’impact des lésions professionnelles, en considérant à la fois les coûts financier et humain assumés par les employeurs, les travailleurs et la collectivité. Il synthétise l’effet mesuré par plusieurs indicateurs en un seul. Le coût des lésions professionnelles acceptées survenues au cours d’une année est estimé à 4,84 milliards de dollars ($ de 2011), en moyenne, pour la période 2010-2012. Le coût moyen d’une lésion professionnelle s’élève à 52 400 $. Le coût moyen d’une maladie professionnelle (211 600 $) est environ 5 fois supérieur à celui d’un accident (41 800 $). L’exposition au bruit (188 100 $) et les accidents de transport (130 600 $) sont les genres d’accident ou d’exposition qui engendrent les coûts moyens par lésion les plus élevés. L’exposition au bruit (777 M$) ainsi que les chutes au niveau inférieur et sauts (397 M$) sont les genres d’accidents ou d’exposition qui occasionnent le plus de coûts par année.

Le chapitre 9 présente les industries-catégories professionnelles qui se situent en tête de liste pour les principaux indicateurs produits. Il appert que les 14 industries-catégories professionnelles ayant les taux de fréquence-gravité ETC des lésions avec PTI les plus élevés représentent près de 8 % de la main-d'œuvre, mais 24 % des lésions avec PTI. Il y en a 6 pour lesquelles les coûts par employé ETC demeurent parmi les plus élevés. Ces indicateurs ont donc toute leur pertinence pour identifier les regroupements de travailleurs les plus affectés par les lésions professionnelles indemnisées par la CNESST.

Note

Ce rapport a une annexe, RA-963.

Informations complémentaires

Catégorie : Rapport de recherche
Auteur(s) :
Projet de recherche : 2013-0025
Mis en ligne le : 25 avril 2017
Format : Texte