Résumé Les travailleurs indemnisés à la suite d’un accident routier au travail (ART) représentent environ 2 % de tous les travailleurs indemnisés par la Commission de la santé et de la sécurité du travail du Québec (CSST). Toutefois, les décès liés à un accident routier représentent entre 25 % et 30 % de tous les décès accidentels au travail. Ils représentent la première cause de décès accidentels au travail. Devant ce constat, l’IRSST a subventionné une étude sur les ART au Québec. Celle-ci comporte deux volets qui font chacun l’objet d’une publication distincte. Le premier volet est constitué d’une revue de la littérature sur les facteurs de risque des ART (rapport IRSST R-791) et le second présente une analyse inédite de données statistiques; c’est l’objet du présent rapport. Un effort conjoint de la CSST et de la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ) a en effet permis la création d’une base de données unique de plus de 8000 travailleurs qui ont été indemnisés par la CSST à la suite d’un accident de la route au travail ayant eu lieu entre les années 2000 et 2008. Il en ressort que les travailleurs impliqués dans un ART le sont principalement à titre de conducteur (83 %) mais aussi de passager (11 %) et de piéton (6 %). Près du quart des ART impliquent des camionneurs ou des chauffeurs-livreurs, 10 % des policiers ou détectives, 6 % des manœuvres ou manutentionnaires, 5 % des chauffeurs d’autobus et un peu moins de 3 %, le personnel spécialisé et auxiliaires des soins infirmiers et thérapeutiques. Ensemble, ces professions correspondent à près de la moitié des travailleurs impliqués dans un accident routier au travail. Les secteurs d’activité les plus représentés sont l’administration publique (22 %), le transport et l’entreposage (20 %), le commerce (14 %), les autres services commerciaux/personnels (12 %) et les services médicaux et sociaux (10 %). Près de quatre travailleurs victimes d’un ART sur cinq proviennent de ces secteurs. Des analyses de correspondances multiples et de classification ont permis d’identifier sept segments (« types ») d’ART. En ordre d’importance en termes de nombre de travailleurs indemnisés, figure d’abord le segment qui regroupe en majorité des collisions entre deux véhicules ou plus dans des zones où la limite de vitesse autorisée est de 60 km/h ou moins ; c’est le quart des ART. Le second segment le plus important (23 %) regroupe également des victimes de collisions entre deux véhicules ou plus, mais qui ont lieu dans des zones où la limite de vitesse autorisée est plus élevée. La proportion d’accident mortel ou grave est ici le double de la moyenne, soit 31 %. Ensuite, un autre groupe (18 %) se distingue par le fait que les travailleurs qui le constituent ont été blessés pour la plupart dans des accidents n’impliquant qu’un seul véhicule tels des sorties de route ou des collisions avec un objet fixe. Quant au quatrième segment (16 %), il représente principalement les travailleurs qui n’ont pas subi de blessure apparente lors de l’accident, selon le rapport de police. Les accidents impliquant des véhicules d’urgence telles les voitures de police, les ambulances et les véhicules d’incendie présentent principalement les caractéristiques spécifiques du cinquième segment et regroupent 10 % des ART. Le sixième segment (6 % des ART) est composé des travailleurs piétons qui subissent, lorsqu’ils sont victimes d’un accident, des blessures graves ou mortelles dans un cas sur quatre. Finalement, le dernier segment (2 %) est formé essentiellement de travailleurs blessés dans un environnement forestier. Même s’ils sont peu nombreux, ce type d’accident est celui qui génère la plus grande proportion de blessures graves ou mortelles, soit dans le cas d’un accident sur trois. Parmi les caractéristiques qui distinguent ces sept segments, nous retrouvons le type de véhicule, la limite de vitesse autorisée, l’environnement, la sévérité et la nature de la blessure, la cause probable de l’accident, le genre d’accident, l’aspect de la chaussée, l’heure de l’accident et le sexe du travailleur. Il y a aussi des différences significatives entre les segments en ce qui a trait au nombre de jours d’indemnisation et au montant total des prestations. La prévention des accidents routiers au travail représente un défi pour le monde du travail et la CSST. Les résultats de cette étude contribuent à une meilleure compréhension de la problématique et fournissent de l’information utile pour développer des programmes de prévention adaptés aux spécificités de chacun des segments d’accidents routiers au travail identifiés.