Résumé Problématique : La prévalence du trouble d’anxiété généralisée (TAG) est plus élevée chez les personnes ayant une lombalgie, comparativement à la population en générale. En présence d’un TAG, l’intolérance à l’incertitude sera élevée et des stratégies inefficaces entraîneront le maintien de l’anxiété. À long terme, une réduction de l’efficacité personnelle à résoudre des problèmes et l’apparition de symptômes dépressifs pourraient nuire au retour au travail.L’objectif général de cette étude exploratoire vise à mieux comprendre la nature des manifestations anxieuses de travailleurs ayant un TMS persistant. Pour ce faire l’objectif principal est de documenter la présence, l’intensité et la variation dans le temps du TAG et de ses facteurs de maintien, selon le modèle de Dugas et coll. (1998). Ces facteurs sont : l’intolérance à l’incertitude, les inquiétudes, l’attitude négative à l’égard des problèmes, les croyances relatives à l’utilité de s’inquiéter, l’évitement cognitif et la dépression. Comme objectifs secondaires, il s’agit (1) de documenter de façon exploratoire les relations entre les facteurs composant le modèle du TAG de Dugas et coll. (1998) et les facteurs biopsychosociaux déjà reconnus dans le domaine des TMS et (2) de documenter la relation entre les précédents facteurs et le retour au travail.Méthode : Un devis observationnel et prospectif à mesures répétées a été retenu. Un échantillon de convenance de 39 travailleurs a été recruté. Les critères d’inclusion étaient: 1) avoir un TMS accepté et compensé par la CSST et causant une absence au travail de plus de 3 mois; 2) être âgé de 18 à 64 ans; 3) parler le français et 4) avoir dans son plan de traitement une exposition au travail. Les facteurs d’exclusion étaient : 1) avoir un TMS relié à une pathologie spécifique et 2) la présence de troubles mentaux sévères identifiés au dossier médical. Les travailleurs ont été évalués (1) au début de la prise en charge, (2) lors des premières heures de retour au travail, (3) à 50% de leur temps complet et (4) à la fin de la prise en charge à l’aide de questionnaires auto-administrés validés et mesurant les facteurs composant le modèle du TAG, les facteurs biopsychosociaux reconnus dans le domaine des TMS et les facteurs médico-administratifs. Résultats : Un total de 50 % des participants présentent les symptômes d’un TAG. Le portrait n’est cependant pas typique d’un TAG, en ce qui concerne l’intensité des symptômes liée aux facteurs de maintien et de développement du trouble d’anxiété généralisée. L’intolérance à l’incertitude, les inquiétudes, l’attitude négative à l’égard des problèmes, les croyances relatives à l’utilité de s’inquiéter, l’évitement cognitif et la dépression réduisent significativement durant le programme de réadaptation. À la fin de la réadaptation, seulement 21 % des participants présentaient encore les critères diagnostics du TAG. Les facteurs biopsychosociaux déjà reconnus dans le domaine des TMS ne semblent pas être significativement associés aux facteurs composant le modèle du TAG. La perception de bénéficier d’un environnement de travail sécuritaire est cependant associée à moins de risque de présenter des symptômes du TAG. En ce qui concerne le retour au travail, les facteurs qui y sont associés sont : l’utilité de s’inquiéter, la kinésiophobie, la dramatisation de la douleur et les perceptions de bénéficier de l’ergonomie et de la gestion de l’invalidité. Conclusion et retombées : La comparaison avec des données empiriques ou normatives permet aussi d’interpréter et de mieux comprendre l’ampleur des difficultés éprouvées par les travailleurs ayant une incapacité au travail.